Mercredi 10 mars 2010 3 10 /03 /2010 09:57

J’ai reçu la très intéressante réaction suivante à mon article n° 299. Ce texte est un peu long mais sa valeur documentaire mérite la lecture. Les mises en gras sont de ma part.

 

Le mot voile n'existe pas dans la langue arabe du septième siècle.


Article paru dans le quotidien tunisien La Presse
, le 21 Octobre 2006 
:

Nouvelles considérations sur le voile islamique

par 
Iqbal AL GHARBI, professeur à l’Université Zeïtouna
 (Tunisie)


Dans le combat contre les totalitarismes et la lutte pour les libertés et la dignité humaine, nous pensons que la ligne de démarcation ne passe pas obligatoirement entre l’Occident et l’Orient, 
entre le Nord et le Sud, mais plutôt entre intégristes de toute obédience et rationnels de tous les pays. Entre autoritarisme et démocratie. Entre ceux qui possèdent la Vérité et ceux qui savent
 douter
.


Les discours islamistes dans le monde musulman ont émergé dans des contextes politiques et économiques très différents. Malgré leur ressemblance manifeste, il serait toutefois erroné de considérer
 ce phénomène comme un mouvement unique et homogène. Les conflits locaux, leur médiatisation, les transformation sociales, les crises économiques, les références étrangères façonnent des mouvements 
islamistes polymorphes et diversifiés. Cependant, malgré ces dissemblances, les fondamentalistes musulmans sont consensuels sur deux questions étroitement liées : la quête de l’identité et le
 statut de la femme.
 
En effet, incapables de définir et de promouvoir une politique et une économie alternative qui soient spécifiquement islamiques, les intégrismes musulmans n’ont identifié qu’un seul domaine porteur
 de l’essence de l’identité islamique : la question de la femme. La revendication du port du voile islamique pour les femmes est le point pivot de toute leur politique à l’égard des femmes et même 
de toute leur idéologie.


Un déchiffrage rapide de leurs discours nous montre que le hijab cristallise tout le système anthropologique, juridique, culturel et politique de l’islamisme.
 Un discours du refus
 
Au regard de cette lecture, nous comprenons que ce vêtement n’est que la partie apparente de l’iceberg. La signification du voile islamique, indépendamment des variantes socioculturelles qu’il
 adopte, transcende largement celle d’être un simple uniforme, supposé protéger le corps féminin de la convoitise des hommes. Derrière le voile, il y a toute l’interprétation rétrograde de la 
chariaâ. Il y a les trois inégalités essentialistes qui caractérisent cette interprétation :
 
L’inégalité entre homme et femme, l’inégalité entre musulman et non-musulman et l’inégalité entre homme libre et esclave. Ainsi, le voile devient un message religieux qui nécessite une 
interprétation. Il révèle des conceptions rétrogrades occultées par la dissimulation tactique «taquiyya» prônée dans les propos officiels politiquement corrects : comme la supériorité du musulman 
sur l’infidèle, l’interdiction de la liberté de conscience, l’intolérance, la polygamie, la répudiation et la lapidation. Le discours que véhicule le voile islamique est donc un discours de refus, 
refus du sujet, de son autonomie, de sa liberté, de l’égalité homme-femme, de la mixité, de la laïcité de l’espace public, des droits de l’homme, des valeurs démocratiques.


Les intellectuels qui défendent le voile islamique et le considèrent comme un symbole impartial en cultivant le doute relativiste et en sacralisant la recherche de l’altérité et le culte de la 
différence doivent tenir compte des faits suivants :
 
-  Sur le plan étymologique, le terme «voile» en français est utilisé comme traduction du mot arabe «hijab». Or du point de vue linguistique, cette traduction est un glissement de sens. Le mot
«voile» devrait traduire «nikab» ou «khimar», car le nikab et le khimar sont, comme le voile, une pièce d’étoffe servant à cacher le visage. Par ailleurs, la traduction du mot arabe «hijab», qui 
est apparu dans le Coran, par «voile» n’est pas exacte, car le terme adéquat est «store», «draperie», «paravent» ou «rideau». En effet, le mot hijab dérive du verbe hajaba : «dérober aux regards, 
cacher». En médecine, c’est une membrane qui sépare les unes des autres certaines parties de l’organisme.
 
C’est ainsi qu’on parle de hijab al djawf (diaphragme) ou de hijab al bukuriyya (hymen). Aux yeux des mystiques, le hijab est tout ce qui voile le but, tout ce qui rend l’homme imperméable à la
 réalité divine. Le hijab est également le talisman écrit par un cheikh qui permet à son porteur une séparation mystique, une protection contre les aléas du réel.
 
-  Par ailleurs, le thème du hijab est abordé huit fois dans le Coran dans les sourates 7, 17, 19, 38, 41, 42, 83 et 33. Et pas une seule fois pour désigner l’habit dont la femme devrait se 
couvrir la tête. Les seuls versets qui contiennent des recommandations vestimentaires et de pudeur sont les versets 30 et 31 de la sourate 24 ou sourate «Al Nour». Egalement, dans le verset 59 de 
la sourate 33 ou sourate «Al Ahzab», Allah conseille aux femmes du Prophète de se faire reconnaître en dépliant sur elles leurs jalabib (manteau ou cape). Il ne s’agit pas donc d’un nouvel élément
 vestimentaire, mais d’une nouvelle façon de porter l’ancien, de se distinguer au niveau des gestuelles.
 
En outre, ce verset concerne effectivement les femmes, mais pas n’importe quelles femmes. Il vise clairement les mères des croyants qui ne sont autres que les femmes du Prophète, auxquelles on doit
 respect, et que l’on ne peut prendre pour épouses, veuves ou divorcées, puisque le Coran leur a octroyé le titre de Mères de tous les croyants. Certains exégètes rappellent que la différence de 
traitement en ce qui concerne leur impossibilité de se remarier, citée dans le même verset que le hijab, et le double châtiment ou la double récompense qui ne s’adressaient qu’à elles souligne bien qu’il ne s’agit pas d’une règle universelle mais d’une règle spécifique et contextuelle s’appliquant exclusivement aux épouses du Prophète.  


La décision arbitraire de certains exégètes de considérer ce verset comme ayant une portée générale, c’est-à-dire intemporelle, universelle, valable pour toutes les situations, est contraire aux
 exigences orthodoxes de l’exégèse qui prescrit de tenir compte des causalités, «asbab annuzul». Cette supercherie constitue le principal fonds de commerce des positions rétrogrades de l’islamisme
 et des milieux conservateurs en niant l’historicité et la relativité du texte sacré.  
Les oulémas musulmans affirment que le voile islamique est obligatoire uniquement pour la femme libre. Pour les fuqahas des quatre écoles de la jurisprudence musulmane, l’école malékite, hanafite, 
chaféite, hanbalite, la femme esclave qui est écartée des circuits de la circulation des épouses et éloignées de la filiation généalogique ne doit pas se voiler, sa awra (zone corporelle qui doit 
être cachée) est assimilée à celle de l’homme afin de favoriser la traite des esclaves et protéger les intérêts commerciaux. Le calife Omar Ibn Khattab punissait sévèrement la femme esclave qui
 osait se voiler car elle mettait en danger la distinction de classe entre femme libre et femme esclave.
Déni de la différence
 
-  A toutes les époques, le port du voile a été réfuté au sein même du monde musulman. A commencer par l’arrière-petite fille du Prophète Mohamed, Sukaïna Bint El Hussein, qui refusait 
obstinément de porter le voile. Aïcha Bent Talha, la petite-fille du premier calife de l’Islam et compagnon du Prophète, Aboubakr, affirmait quant à elle que «si Dieu lui avait fait don de sa 
beauté, elle ne voyait pas pourquoi elle devrait la cacher sous un voile». Depuis ce temps, les mouvements progressistes et féministes l’ont toujours contesté.
 
-  Dans certains pays musulmans, le voile est imposé également aux femmes non musulmanes, ce qui révèle ses véritables enjeux : phobie de la féminité, déni de la différence de sexe, déni de la 
différence elle-même qui remet en cause la parole univoque !
 
Aujourd’hui, on comprend aisément que le voile islamique nous apparaît comme un signe politique et comme un marqueur religieux. Il cristallise une série d’exigences imposées à la femme musulmane :
 l’abdication d’être un esprit libre dans un corps réapproprié. Vu que lorsque la norme disciplinaire réussit à pénétrer le quotidien pour quadriller et stériliser le corps, le désir, la sensibilité
 esthétique, bref la disposition innée de l’homme au plaisir, cela permet toutes les dérives totalitaires. Et dans le combat contre les totalitarismes et la lutte pour les libertés et la dignité 
humaine, nous pensons que la ligne de démarcation ne passe pas obligatoirement entre l’Occident et l’Orient, entre le Nord et le Sud, mais plutôt entre intégristes de toute obédience et rationnels 
de tous les pays. Entre autoritarisme et démocratie. Entre ceux qui possèdent la Vérité et ceux qui savent douter. Dans cette perspective, le voile ne sera plus évalué en termes de modernisme ou de
 spécificité culturelle, mais plutôt jugé par le seul critère normatif qui vaille : l’humanité de l’homme.
 

 

I.A.G.

 

PROLOGUE: 
Les réglementations de voiles n'ont aucun rapport avec une croyance monothéiste proprement dit ni avec la religion, ce ne sont qu'idées d'origine masculine [phallocrate ou patriarcale] dont
 l'origine remonte a dix neuf siècle avant les rédactions du coran. Il est bon de se souvenir que le mot voile n'existe pas dans la langue arabe du septième si
ècle.

Par Casanova - Publié dans : Information
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